Actionnariat salarié – Un levier RH, financier et stratégique pour les PME

Ilan Free, ECM analyst chez Euroland Corporate
15 avril 2025

Longtemps perçu comme un privilège réservé aux cadres dirigeants de grandes entreprises cotées, l’actionnariat salarié gagne pourtant du terrain dans l’univers des PME. Derrière cette mécanique d’association au capital se cache un puissant levier d’alignement, de fidélisation, de financement et de gouvernance. Le tout dans un contexte juridique de plus en plus incitatif… mais paradoxalement fragilisé par la dernière loi de finances. À l’heure où les entreprises doivent instaurer au moins un dispositif de partage de la valeur à partir de janvier 2025, l’actionnariat salarié mérite une attention renouvelée.

Un outil RH d’alignement et d’engagement

L’actionnariat salarié permet aux salariés de devenir actionnaires de leur entreprise, souvent à des conditions préférentielles, via une augmentation de capital dédiée, l’attribution d’actions gratuites (AGA), des BSPCE ou un Plan d’Épargne Entreprise (PEE). Ce lien direct entre performance collective et rémunération individuelle génère un puissant effet d’engagement.

Selon une étude Kantar, 80 % des dirigeants de PME estiment que l’épargne salariale et l’actionnariat salarié sont des leviers efficaces de motivation et de fidélisation

Les salariés impliqués dans le capital comprennent mieux les enjeux stratégiques de leur entreprise, et leur attachement à long terme se renforce. Cette dynamique est d’autant plus importante dans un marché du travail tendu, où l’enjeu RH devient structurel.

Un mécanisme fiscalement incitatif… sous pression

Pour les entreprises, l’actionnariat salarié est aussi un levier d’optimisation financière. Les sommes versées dans un PEE sont exonérées d’impôt sur le revenu pour le salarié, et les abondements versés par l’employeur sont exonérés de charges sociales, dans certaines limites. La loi PACTE avait déjà supprimé le forfait social sur l’intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés.

Mais la récente loi de finances pour 2025 marque un tournant. Le forfait social sur les AGA passe de 20 % à 30 %. Une décision largement critiquée par les acteurs de la place, qui y voient un coup d’arrêt porté à la logique de « capitalisme de partage » portée par le gouvernement en 2023.

À noter cependant : les PME de moins de 250 salariés peuvent être exonérées de cette hausse, à condition de ne pas avoir distribué de dividendes, et de respecter des plafonds de chiffre d’affaires (50 M€) ou de bilan (43 M€).

Paradoxalement, ces mesures interviennent alors que la France est leader européen de l’actionnariat salarié, avec 3,6 % du capital des entreprises détenu par leurs salariés, contre 1,5 % en Allemagne et 1,3 % au Royaume-Uni.

Un potentiel massif pour les PME… encore peu exploité

57 % des entreprises françaises ont lancé une opération d’actionnariat salarié en 2024, selon la 13e édition de l’enquête annuelle de la Fédération Française des Associations d’Actionnaires Salariés et Anciens Salariés (FAS). Mais derrière ce chiffre record se cache une forte disparité : les TPE-PME sont encore largement sous-équipées, faute d’accompagnement ou de connaissance des dispositifs.
Une étude publiée par Ecoreseau rappelle que moins de 1 % des entreprises de moins de 50 salariés ont mis en place un dispositif d’actionnariat salarié. Les freins sont connus : lourdeur juridique, incertitudes sur la valorisation des titres non cotés, absence de liquidité perçue.

Et pourtant, les arguments ne manquent pas : fidélisation, motivation, transmission progressive, stabilité actionnariale. C’est d’autant plus pertinent que la loi du 29 novembre 2023 impose désormais aux entreprises de 11 à 49 salariés, à compter de janvier 2025, de mettre en place un dispositif de partage de la valeur, si leur bénéfice net fiscal atteint au moins 1 % du chiffre d’affaires pendant trois années consécutives.

Chez EuroLand Corporate, nous accompagnons les sociétés cotées qui souhaitent explorer ou renforcer leur stratégie d’actionnariat salarié. Cela passe par des entretiens ciblés avec nos analystes financiers, ou encore l’organisation de visioconférences réservées aux salariés-actionnaires pour faciliter la pédagogie financière et créer un lien direct entre dirigeants et collaborateurs. Une approche sur-mesure, à la hauteur de ce dispositif structurant.

Pour conclure, l’actionnariat salarié n’est ni un privilège réservé aux grandes entreprises ni un dispositif accessoire. Pour les PME, il peut devenir un moteur d’engagement, un outil de fidélisation et un levier structurant de gouvernance. Dans un contexte où le partage de la valeur devient un impératif, il mérite d’être envisagé avec attention. À condition que le cadre réglementaire reste lisible et adapté aux réalités du terrain, l’actionnariat salarié peut contribuer durablement à renforcer le lien entre performance économique et dynamique collective.

Pour lire la suite, abonnez vous à notre newsletter
C'est GRATUIT !


menuchevron-downcross-circle