Suppression du "Say on Cimate" : reculer pour mieux sauter ?

Thomas Hornus, associé chez EuroLand Corporate
2 novembre 2023

Le Say on Climate : de quoi s’agit-il ?

L'amendement « Say on Climate » avait été adopté en juillet 2023 par l'Assemblée nationale, contre l'avis du gouvernement et de la commission des affaires économiques.

Il avait pour objectifs de rendre obligatoire pour les entreprises cotées sur un marché réglementé en France de :

• présenter tous les trois ans à leurs actionnaires leur stratégie climat et durabilité, dans le cadre d’un vote consultatif ;

• établir un rapport annuel sur la mise en œuvre de cette stratégie climat et durabilité également soumis à l’approbation de l’assemblée générale

Un amendement controversé

Il avait suscité une intense controverse, les entreprises cotées craignant une charge administrative supplémentaire et une perte de contrôle sur leur stratégie climat.

Les partisans de l'amendement « Say on Climate » estimaient qu'il était nécessaire de renforcer la transparence et la responsabilité des entreprises en matière de climat. Ils faisaient justement observer que le vote consultatif des actionnaires permettrait de donner une voix aux investisseurs et aux autres parties prenantes, et de contribuer ainsi à l’accélération de la transition vers une économie bas-carbone.

Les opposants à l'amendement estimaient, quant à eux, qu'il était inutile et contraignant. Ils considéraient, en effet, que les entreprises cotées sont déjà amplement engagées dans la transition climatique, et que les informations sur leurs politiques et leurs performances en la matière restent largement accessibles dans la documentation permanente ou périodique qu’elles doivent publier (rapports financiers / Document Universel d’enregistrement / Déclaration de Performance Extra-Financière / etc.). Certains des contradicteurs de cet amendement lui faisaient aussi le reproche de brouiller la lisibilité de la répartition entre le pouvoir de surveillance de l’organe de gouvernance de la société (conseil d’administration ou de surveillance), le pouvoir exécutif des dirigeants et le pouvoir souverain de l’assemblée générale.

Le 9 octobre 2023, la Commission mixte paritaire (CMP) chargée d'examiner le projet de loi Industrie Verte a finalement supprimé cet amendement.

Conséquences de cette suppression

La décision de la CMP de supprimer l'amendement « Say on Climate » peut être considérée comme favorable aux entreprises cotées sur un marché réglementé en France. Elle extériorise un signal fort et confirme que le gouvernement et le Parlement ne souhaitent pas imposer des contraintes supplémentaires aux entreprises en matière de climat, alors que celles-ci sont déjà largement engagées dans la transition et ce, vraisemblablement pour éviter que les investisseurs étrangers ne perçoivent la France comme un pays dans lequel investir est soumis à une réglementation spécialement lourde par rapport à certains autres pays européens.

La suppression de l'amendement « Say on Climate » n'empêche néanmoins pas pour autant les entreprises cotées de communiquer sur leurs politiques et leurs performances en matière de climat. Elles continuent d’ailleurs d'être soumises aux obligations prévues par la directive européenne sur la divulgation de la durabilité des entreprises (CSRD), qui entrera en vigueur dès 2024.

Évidemment, l’arsenal législatif et réglementaire français relatif à la transition écologique, au climat et à la durabilité reste exigeant et ce dernier pourrait encore évoluer dans les années à venir. Il faut également tenir compte de la pression qui pourrait provenir des investisseurs et des actionnaires eux-mêmes, pour qui, sans un Say on Climate volontaire, investir ou conserver leur investissement dans la société ne serait pas possible.

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